I am empty ’til she fills

Tu vas me dire c’est con hein, tu vas me dire que c’est se prendre la tête pour rien. C’est un frein que je ronge sans jamais rien changer et ça doit t’épuiser à force. C’est comme une corde usée à mon character arc qui n’a pas encore pété.

J’étais dans le métro tout à l’heure. J’écoutais de la musique, je regardais vos stories Insta. Films vus, recommandations de podcasts. Je me disais c’est génial mais je vais pas les suivre. De toute façon j’écoute pas (plus) de podcast. De toute façon il y en a trop, je ne sais pas par où commencer ni quand les écouter. J’écris pour essayer d’identifier ce qui ne me va pas. Pas avec vous mais avec moi. Qu’est-ce qui me dérange tant que ça ? Qu’est-ce qui fait que je m’exclue ?

Watching TV tired, bleeding on the bed
The milk has just expired, all the leaves are dead
I’m not quiet, you’ve been quiet, just receiving what you said
Reeling, feeding, feeling filled by everything you fed
I see you as you see yourself through all the books you read
Overwhelmed with guilt and realizing the disease

Vampire Empire – Big Thief, 2023

Depuis longtemps, sans doute toute ma vie adulte, j’ai refusé de lire. On pourrait dire que c’est le retour de bâton d’études littéraires et de lectures forcées, mais je lisais déjà pas tant que ça, souvent de travers, et certainement pas les recommandations pour étendre son horizon. Ma mère me rappelait qu’enfant je refusais de lire dans la journée car c’était le soir au lit qu’il fallait lire ; j’avais fixé des règles, restreint le temps que je pouvais m’arroger — je ne vois pas ce qu’un enfant avait de plus important à faire que de se distraire, je passais sans doute des journées prostrée avant de me glisser enfin au lit « Ah je peux enfin profiter ». Aujourd’hui encore je garde ma lampe de chevet allumée sans jamais retrouver le courage d’ouvrir un livre. Oriane me demande de l’éteindre et je lui réponds toujours que je vais lire, comme un rituel d’auto-conviction…

Très bêtement, ça me semble rejoindre un non-événement de la semaine dernière. Face à témoin, ma belle-mère me voyant faire mes lacets me propose une autre façon de doubler le nœud, je refuse, j’essaie de trouver l’argument logique (en effet si tu marches sur un des lacets le nœud se défait…). Oriane dit que j’aime pas qu’on m’apprenne des choses. Je nie sans passion.

Ouais peut-être. Hmm.

Alors je reste dans mon univers que je sens chaque jour plus étroit.

C’est refuser toute forme de partage comme une infantilisation, le reproche de ce que je ne sais pas déjà, l’humiliation de ne pas l’avoir su par moi-même, comme si ces connaissances étaient intuitives, comme si on pouvait naviguer dans le monde à la seule force du bagage scolaire et du peu qui trickle down via l’infotainment. Si je ne sais pas ça, c’est que je n’ai pas fait en sorte de le savoir (sortez le fouet). Si je ne sais pas ça, alors je dois rester dans mon ignorance pour me punir de ne pas l’avoir déjà su.

Derrière, c’est sans doute l’autre qui fait un pas vers moi, et moi qui estime que je ne le mérite pas.
Je n’ai pas le droit d’être curieuse, ce serait 1. perdre du temps 2. s’octroyer du temps 3. accepter tout le temps déjà perdu pour rien.

J’ai un rapport bien trop économique au temps et à la connaissance. Et pour me laver de cette conception, je me suis tout bonnement retirée de l’équation. No fun. Le divertissement n’est pas lieu d’être.

Je tourne en rond. J’ai peur de ne m’intéresser à personne, alors qu’on s’intéresse à moi, mais que si on s’intéresse à moi c’est qu’on me fustige.

Le fait est que j’ai deux refuges. La musique, toujours la même, j’en découvre très peu. J’écoute ce que tout le monde écoutait déjà il y a 20ans. Si j’en découvre que les gens aujourd’hui écoutent, je me mets en danger d’en faire un moyen de connexion avec qui que ce soit, et ça demande un niveau d’investissement que j’ai peur de ne pas avoir.
Les séries tv. Dès l’adolescence ça a dû m’occuper, c’est un domaine dans lequel je me sens assez familière pour poursuivre le visionnage de nouveautés. Alors pendant des années ça a été mon relai avec le monde, j’étais Abed, la seule corde à mon arc. Aujourd’hui j’ai ralenti, à nouveau je me sens dépassée, surtout la fatigue de consommer ce qui n’était pas (plus) même un divertissement se fait sentir.

J’aimerais trouver le temps de m’intéresser à ce qui t’intéresse, parler de ce qui te passionne. Je me suis refermée sur moi-même et je ne te laisse même pas ouvrir la porte. Je veux apprendre mais que tu n’enseignes pas, savoir faire le pas.

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