Try to try again

J’écoutais la BO de Life is Strange — comme si je n’avais qu’un disque et qu’une seule fréquence émotionnelle. J’écoutais The sense of me de Mud Flow, et là m’est peut-être venue, plus prégnante (get it) que jamais, la réalisation que mon enfant n’aurait sans doute jamais le cœur en morceaux à l’écoute de cette chanson, et que moi-même je ne ressentirai jamais les exacts same tiraillements de l’intérieur lorsque le sien sera en miettes. Ce jeu ne sera jamais son jeu, il aura les siens. Mes musiques seront un peu les siennes, mais pas pour les mêmes raisons.

J’imagine que c’est une évidence pour tout le monde, tout du moins pour les personnes qui ne font pas un enfant pour « perpétuer la lignée » ou « reproduire la race ». On ne se comprendra pas, et ça me bouleversera mais ce sera dans l’ordre des choses. C’est une évidence mais c’est déjà épuisant, ça je ne sais pas si c’est pour tout le monde, on ne m’en a pas vraiment parlé.

C’est un travail de tous les instants de se dire que je ne suis pas l’enfant, qu’iel ne sera pas moi, qu’iel ne va pas faire les mêmes erreurs, n’aura pas les mêmes envies ni les mêmes rêves. « La chair de ma chair » urgh mais on est où ? On aura beau parler de tout et de rien jusqu’à une potentielle phase de mutisme adolescent, ce sera du temps à découvrir une nouvelle personne et non à la façonner. J’aurai beau te faire découvrir le monde, tu n’en retiendras que ce que tu veux.

Je ne l’ai pas dit à ma psy ce matin, quand on parlait de sacrifice et de culpabilité (mes schémas préférés si jamais vous ne l’aviez pas deviné). Je ne me sacrifierai pas pour mon enfant, en tout cas pas comme ça, pas comme si je lui signifiais que je n’étais rien et que l’autre n’était là que pour toi. Je ne lui ferai pas porter le fardeau de culpabilités qui ne devraient même pas être les miennes, il n’est pas question qu’iel vive prostré·e et craintif·ve. Enjoy your consequences. Je ne me confierai pas à ellui, pas comme on se confie à nos plus cher·es ami·es ; j’espère qu’iel se confiera à moi, comme on cherche à grandir. Je connais l’empathie et le respect, fais-en bon usage.

Les gens parlent souvent d’une deuxième puberté, voire d’une deuxième adolescence pour les personnes trans : une histoire d’hormone mais aussi de nouvelles libertés et d’accession à soi. Post-ado j’ai souvent prétendu n’en avoir jamais eu. Aujourd’hui je ne veux pas que la parentalité en soit une troisième.

Parfois j’ai peur que mon désir d’enfant soit un désir d’avoir enfin une personne qui sera proche de moi comme personne d’autre, ami·e copie… c’est horrible comme mot, la reproduction.
Si je me dis ça c’est que j’ai souvent peur de n’avoir jamais vraiment réussi à trouver l’amitié, celle des films et des séries. Des ami·es j’en ai et je les aime, et c’est avec eux que je dois me débarrasser des boulets sacrificiels et culpabilisants.
Si je me dis ça c’est que j’ai tendance à vouloir prendre les choses du début. J’ai peur d’avoir été à côté de moi-même (de l’être peut-être encore), d’avoir manqué trop de choses pour moi comme pour les autres. Alors que là, tout est à construire.
J’aimerais qu’on me dise qu’on peut prendre un train en marche, et qu’on peut construire autre chose. J’aimerais pleurer avec des ami·es qui ressentent ce que je ne comprends pas forcément moi-même dans ce qui me bouleverse avec Life is Strange, et avoir au moins quelques minutes à s’accorder où je réalise qu’on a nous aussi énormément à partager.

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