Tout le monde devrait aller à Lyon.
Si si. Partir de Gerland ou ailleurs là dans les quartiers sud, marcher tout droit sans rien voir d’autre que des façades neuves et vides, des yeux d’hommes pervers, des ruines et friches militaires. Marcher jusqu’au Rhône ou jusqu’à la Saône je ne discrimine pas. Et avoir envie de s’y jeter ; et tout ce qui vous retient c’est l’idée que vous seriez crevée à Lyon.
Non j’exagère. Je viens juste de marcher 30min et vraiment t’avais rien. Tellement rien que malgré la musique et le pas rapide je n’arrivais pas à me taire. Si vous avez besoin de faire le vide allez à Lyon la ville le fera pour vous.
J’y suis pour une sorte d’atelier à l’ENS pour quelques jours. En vrai bon bail, je pense que ça va être fun, l’après-midi était sympa et puis ça suit un début de semaine beaucoup plus intense et stressant.
Mon hôtel est vers le stade mais je n’ai même pas le droit à la vue sur l’immense cheminée de l’incinérateur non, juste sur le parking. Il y a tellement de travaux pour le nouveau tram que je ne comprenais même pas que les gens soient assez motivés pour aller au drive du McDo d’à côté.
Et puis j’ai marché 20min pour aller manger un kebab à 9€ à côté de l’école. Sans frite sans boisson hein. Basique kebab, 9€. Le foutage de gueule.
Là j’ai quitté l’ENS pour aller manger dans un foodcourt. Y’a tellement rien en fait toutes les activités ont été parquées dans des terrains vagues par ci par là. Le truc s’appelle la commune, faut vraiment être des droitards pour reprendre ce nom. Et je vous écris sous une pluie battante au bord du Rhône because of course ce lieu n’est pas encore ouvert il est seulement 18h. Quand je suis arrivée sur le quai il ne pleuvait pas encore mais j’avais les joues humides en écoutant Say Hello To The Angels d’Interpol.
Là aussi, en vrai, c’est la compagnie qui fait le charme. Entourée de jeunes doctorant·es, à discuter de l’état de la recherche, à réfléchir aux solutions à des problèmes qui n’en sont que pour quelques dizaines de personnes… Il y a à manger, à boire, je bois un deuxième, un troisième verre. J’ai peur d’avoir un problème. J’ai aussi peur d’être un problème, sans thèse, mais ce n’est pas l’alcool qui va régler ça. Je blague, ça va ils ne connaissent pas encore trop mon autodérision victimaire, ils n’ont pas lu mon blog.
Je ne suis pas aigrie peut-être désertée.
Camille me disait lundi que ma vie n’est pas un récit transmedia. Too Bad j’ai envie que tu lises entre les lignes de nos existences online enchevêtrées. Tout à l’heure je voyais un Tiktok philosophie de vie slash mise en scène de vacances romaines « on publie sur les réseaux pour soi et pas pour les autres ». Well fuck you too then, j’espère que tu te demanderas si la musique jouée sur spotify à 3h du mat’ l’était pour toi.
No, I don’t need no help
Caught In The Middle – Paramore, 2017
I can sabotage me by myself
Don’t need no one else
I can sabotage me by myself
Il est minuit dans la chambre du Ibis, le crépis des mur jaunit à vue d’œil. Je pense aux œufs brouillés du petit déjeuner, pas très appétissant. Est-ce que je suis en train de créer des relations ici, entre Gerland et le foodcourt des quartiers résidentiels ? Durant le repas, Thibault me disait qu’il avait bien aimé le post sur X que j’avais fait la veille. Post somme toute professionnelle, flattée qu’ils aient encore des vues, il ne lui était même pas destiné. Est-ce que c’est ça que je cherche ? Ma santé mentale tient au fait que je sais encore à qui je veux laisser voir quoi de moi. Thibault ces lignes ne sont pas pour toi, ni les interstices.