Je me dis qu’écrire un blog, c’est une nouvelle tentative de branding, on prend de nouveaux réseaux et on recommence, et on peut presque se réinventer, se réécrire. Il y a encore des choses que je réserve pour mon journal intime, allez pas croire. Mais lui aussi, je l’ai commencé il y a quelques mois seulement. Enfin, si on reste dans la continuité des journaux, « re-commencé », après diverses périodes de vie où j’ai voulu, quoi, laisser le temps aux monologues intérieurs de s’étirer jusqu’à s’étouffer, m’entendre/lire hors d’un brouhaha incessant et qui ne termine jamais ses phrases.
BREF. Quelques changements finalement depuis : j’ai les cheveux rouges et je fais du sport (rien de nouveau par rapport au post précédent en fait).
Voilà, ne vous inquiétez pas, je vais bien.
J’ai pas de groupe test dans mon cerveau gauche pour vérifier qu’écrire fait changer les choses. Mon hypothèse est plutôt que j’écris comme une promesse, si c’est écrit ça doit être mené à bien (l’auto-réalisation tout ça vous avez vu Dune 2 ?).
La question maintenant c’est : est-ce que j’ai changé des choses. En vrai.
J’ai toujours l’impression d’avoir très peu touché à mon corps, de pas me l’être approprié. Je me fous pas de votre gueule, la transition me sort de la tête en permanence. Ça c’est presque anecdotique, un retour à la normale. Je pense plutôt au fait que ça fait 15ans que j’imagine me faire un tatouage (c’était un ourobouros comme les homoncules de FMA à 14ans, puis ça a été les paroles « You’re bringing me down » de LCD, imagine si je l’avais fait dans un tattoo parlor en sortant du Comedy Cellar torchée Ilyass, puis « I want to hold her hand / And show her some beauty before this damage is done » de Arcade Fire). J’ai rien percé d’autre que mes oreilles. Est-ce que je veux tout ça ? Bonne question, j’aimerais avoir l’honnêteté et la tranquillité d’esprit de me dire si je veux je peux. Je continue de traîner ce corps en me disant « oui ça passe » comme une enfant qui met sa tête à travers les barreaux d’une grille. Je suis malade j’ai froid j’ai chaud je mange trop j’oublie de manger « oui ça passe ». Mon corps : « ça passe pas » (sauf que : brouhaha inaudible).
L’an dernier c’était discret, j’ai fait des pointes violettes. Et puis la couleur est partie, la décoloration est restée. Cette année c’est tout qui passe au bain de ACE chemicals. Boum action, maintenant quand je croise le regard des gens je me dis qu’ils sont peut-être plus perturbés par la couleur que par mon mauvais passing de meuf trans trop grande et atopique.
2e… changement ? JE FAIS DU SPORT. Je crois que j’ai osé le dire pour la première fois ce week-end. J’étais allée voir la présentation des associations de sport de l’InterLGBT en 2017 je crois aux blancs manteaux. 6 ans plus tard j’ai enfin demandé à m’inscrire à une asso. 6 mois plus tard j’ai enfin osé m’y pointer. Quand on est enfant on choisit pas vraiment ses activités. Et quand on est adulte on choisit ce qu’on faisait enfant pour pas avoir à tout recommencer. Bref, je fais du badminton. Et j’assume l’idée que ce soit du sport. Ouais ça doit vous paraître évident mais moi ça me stresse.
Je sais pas si c’est un truc de gaucho (not a Steely Dan reference) et de mépris de l’activité physique, de meuf trans qui a peur de prendre du muscle et de la place dans un espace (j’ai participé à une compétition amicale entre meufs ne me signalez pas au CIO s’il-vous-plaît), ou bien même rien que l’idée que quelque chose me fasse du bien et que je m’oublie, que le brouhaha, ma brand, se tarisse quelques heures… Sans doute tout à la fois (quand on fait ce genre de listes généralement c’est que c’est un peu tout à la fois).
Me voilà maintenant à scroller des tiktoks d’internationaux de badminton à me dire « si j’avais jamais arrêté j’aurais pu y participer ça a pas l’air compliqué » et à réécrire ma vie entière et à patienter tranquillement en regardant le plafond le soir (« ça te dérange pas si je mets du bruit blanc pour dormir ? » *put on the brouhaha*), à regarder mon corps le matin, insatisfaite mais encore paralysée à l’idée de faire quoi que ce soit pour l’entretenir. BREF, j’ai d’autres choses à écrire dans mon journal. Ma psy a annulé notre prochain rendez-vous.
Parfois c’est bien d’oublier même le silence.