Il y a quelques jours
J’ai vu un livre, je l’ai reconnu
Sa couverture était grise et cornée mais
Immédiatement
J’ai regardé ma bibliothèque pour le retrouver
Rangé entre autres poésies
Et fixée là entre les dalles de béton en ruine
Ce livre est un cadeau
Et je ne l'ai encore jamais ouvert
Il doit y avoir quelque chose, un mot seulement qui
Me dira tout ce que je dois savoir du livre
Une page
Au hasard
La prétention d’y concentrer une vie
Tu as peut-être pu lire ce que je n’ai pas eu le courage de lire
Trouver une voix qui me manque, et que je ne peux pas transmettre à mon tour
Le livre survit sans lecteur
Ailleurs les livres brûlent aussi
Reprenons du début
Le début d'une mort en couverture
Qui ne fera jamais la une
On ne construit pas les murs qui résistent aux balles aux drones aux tanks aux mortiers au phosphore avec des livres
Il sera là et c’est la trace des mensonges des mots
Aucune ligne ne dira vrai comme ta mort
Une bibliothèque entière absente qui oublie nos morts
Notre ignorance indélébile qui efface vos noms et cache vos corps